Poutine et Ahmed al-Charra se sont rencontrés le 15 octobre 2025 au Kremlin. Pour le leader temporaire de la Syrie, c’est la première visite en Russie après la chute du régime de Bachar al-Assad.
Le nouveau président de la Syrie à Moscou
La rencontre s’est déroulée à huis clos. Le service de presse du Kremlin a sobrement déclaré : « les relations bilatérales et les questions de sécurité ont été discutées ». Mais, en réalité, il s’agissait du sort de toute la configuration syrienne des dix dernières années.
Poutine a « rappelé » que Moscou « se guide par les intérêts du peuple syrien ». Al-Charra, en réponse, a promis que le nouveau pouvoir « respectera tous les accords signés sous Assad ».
En d’autres termes, la Russie peut conserver ses bases — Tartous et Hmeimim, et la Syrie obtient la reconnaissance de la part du Kremlin.
Assad en exil, mais sous la protection de Moscou
Selon le journal allemand Die Zeit, Bachar al-Assad vit à Moscow-City. On dit qu’il passe ses journées à jouer aux jeux vidéo. Symboliquement : l’homme qui a dirigé un pays pendant plus de dix ans, où des bombes tombaient chaque jour, s’est maintenant réfugié dans des mondes virtuels.
Officiellement, Damas a déjà demandé son extradition. Mais pour Poutine, Assad n’est pas simplement un fugitif, mais un atout. Aussi cynique que cela puisse paraître, l’ex-dictateur est toujours nécessaire à Moscou comme rappel de la « victoire syrienne ».
Le prix de cette « victoire »
L’analyste militaire israélien Yigal Levin fournit des chiffres qui glacent le sang :
« Selon les données de l’Observatoire syrien des droits de l’homme, entre 2015 et 2020, 19 274 personnes ont été tuées à cause des actions des troupes russes, dont 3 320 femmes et enfants ».
Plus de huit mille étaient des civils. Les autres étaient des combattants de l’EIIL et de l’opposition armée.
Levin rappelle :
« La plupart d’entre eux ont été tués par les frappes des forces aérospatiales russes. Ces chiffres ne sont pas simplement des statistiques. C’est la mémoire des personnes tuées par une géopolitique étrangère ».
Les élites ne combattent pas. Ce sont les soldats qui combattent
Dans son commentaire, Levin fait une observation amère :
« Comment se fait-il qu’un ancien commandant de terrain, radical et révolutionnaire, serre aujourd’hui calmement la main de Poutine — le bourreau du peuple syrien ? »
Et il répond lui-même :
« Les élites ne combattent pas. Elles négocient. Ce sont les soldats qui combattent et meurent ».
C’est la loi de la politique — tacite, mais tenace. Hier ennemis, demain partenaires, si le moment l’exige.
Al-Charra, ancien compagnon de Djoulani, parle maintenant de la « contribution de la Russie » et du « développement de la Syrie ». Celui qui était récemment la cible de la CIA et des services spéciaux russes est maintenant devenu un « représentant reconnu de la souveraineté ».
Contraste ukrainien : ici, pas d’accord possible
Levin établit un parallèle : entre Poutine et Zelensky, il n’y a pas seulement un gouffre. C’est une inimitié personnelle, existentielle.
« Souvenez-vous, Trump disait qu’il était frappé par la haine de Poutine envers Zelensky ? Ils ne peuvent pas s’asseoir à la même table — c’est allé trop loin ».
Contrairement à la Syrie, la guerre de la Russie contre l’Ukraine n’est pas pour le pouvoir, ni pour les bases, mais pour l’idée même de liberté.
« Les Ukrainiens, — écrit Levin, — ont humilié la Russie, Poutine et son armée devant le monde entier. Pour cela, il ne pardonnera pas. Ni à Zelensky, ni à Kiev ».
La Syrie comme miroir : ce qui aurait été sans la DCA
À la fin de son analyse, Levin publie une photo : un bombardier russe largue des bombes sur le désert syrien. La légende est courte et effrayante :
« Avec précision “quelque part là-bas” ».
Et il ajoute :
« Si ce n’était pas l’aide du monde libre à la création de la DCA ukrainienne, nous aurions vu la même chose au-dessus de l’Ukraine ».
L’armée russe, selon lui, ne « combat pas humainement » — elle ne sait tout simplement pas faire autrement.
Entre passé et futur
La rencontre entre Poutine et al-Charra n’est pas simplement un geste diplomatique. C’est une tentative de réécrire l’histoire de la guerre. Moscou essaie de maintenir son influence, même si son allié a changé.
Mais derrière les belles formulations sur « l’amitié des peuples » restent des traces — les ruines d’Alep, des milliers de Syriens qui ne verront jamais la vie paisible, et une nouvelle génération de Syriens pour qui « Russie » n’est pas un mot de manuel, mais le son d’une bombe qui tombe.
NAnews : Israël suit attentivement les changements en Syrie, car c’est là que l’expansion militaire russe a commencé, devenant plus tard le prologue de la guerre contre l’Ukraine. Et, comme le souligne Yigal Levin, la seule chose qui empêche le ciel au-dessus de Kiev de connaître le sort d’Alep, c’est la DCA et la solidarité du monde libre.
